Handicap et entrepreneuriat : 5 raisons pourquoi c’est important d’en parler

Handicap et entrepreneuriat, deux termes qui, à mon avis, ne sont pas assez valorisés ensemble au Québec. Les études sur ce sujet sont rares. Et quand on parle des entrepreneurs en situation de handicap, c’est souvent par rapport à leur parcours inspirant, mais rarement en lien avec leur débrouillardise, leurs compétences et leur capacité à innover dans différents secteurs. Cette réalité soulève un enjeu important : comment évaluer les besoins et défis de cette catégorie d’entrepreneurs si elle n’est pas représentée dans les chiffres?

Bien que leurs défis soient similaires à ceux des entrepreneurs sans handicap, l’accès au financement et les accompagnements offerts ne sont pas adaptés à cette clientèle. Il y a aussi encore beaucoup de préjugés. Je pense, par exemple, à ceux qui ont un handicap visible et qui font des démarches auprès des banques par eux-même. Il peut parfois y avoir un malaise, ou les banquiers peuvent hésiter.

Pourtant, les personnes en situation de handicap qui créent leurs propres opportunités pour contrer leurs défis quotidiens ne manquent pas. Que ce soit à temps partiel ou à temps plein, on peut penser à ceux et celles qui sont créateurs de contenus, conférenciers, artistes, athlètes de haut niveau, ou encore ceux qui réussissent à décrocher contrats en entreprise à temps partiel tout en menant des projets d’impact, sans oublier ceux qui arrivent à s’entourer et monter une vraie équipe. Leur parcours est souvent plein de défis uniques, mais aussi d’une résilience et d’une créativité exemplaires.

Dans cet article, j’explique pourquoi il est important de parler de ce sujet.

Pour briser les préjugés

Faire mention des mots handicap et entrepreneuriat plus souvent dans les médias aide à briser les stéréotypes. Trop souvent, les personnes en situation de handicap sont perçues comme dépendantes ou incapables de relever de grands défis. Pourtant, ceux qui choisissent d’entreprendre en créant leurs propres opportunités prouvent le contraire.

Ces individus qui transforment leurs obstacles en opportunités sont capables de créer, d’innover et de diriger leur propre entreprise. J’en ai la preuve avec mes entrevues et recherches pour le balado Capable, entreprendre sans limites. Ce qui me fascine, c’est que ces personnes, qu’elles aient un handicap visible ou invisible, trouvent toujours une façon de faire les choses autrement, à leur manière. En en parlant, ou plutôt en montrant leur débrouillardise et leur créativité, c’est selon moi la meilleure façon de changer les perceptions et de promouvoir une image positive du handicap.

Pour promouvoir des modèles

Je le dis souvent : quand j’étais plus jeune, je manquais de modèles. J’aurais aimé pouvoir m’identifier à une personne sourde ou malentendante qui réussissait dans le monde des communications. Je me dis que c’est sûrement pareil pour d’autres qui ont des différences, qu’elles soient visibles ou non. Les récits d’entrepreneurs en situation de handicap peuvent inspirer ceux qui hésitent à se lancer, souvent à cause de leurs propres limitations perçues. Partager ces histoires montre qu’il est possible de transformer des défis en opportunités et d’atteindre ses objectifs, peu importe les obstacles.

Lire aussi Handicap et entrepreneuriat : présenter des modèles inspirants

Pour sensibiliser les acteurs économiques

Le manque de sensibilisation aux réalités des entrepreneurs en situation de handicap peut freiner leur développement et leur croissance. Ce n’est pas tout le monde qui évolue dans le même environnement, et il est important de sensibiliser ces personnes aux différentes possibilités afin qu’elles puissent non seulement sortir de la pauvreté, mais aussi développer leur autonomie en créant leurs propres opportunités.

Mais pour y arriver, il faut que les acteurs économiques soient sensibilisés et acceptent que leurs méthodes d’accompagnement actuelles ne conviennent pas nécessairement à toutes les personnes ayant un handicap. Ça implique de prendre en compte des défis spécifiques et d’adapter leurs services pour être plus inclusifs.

Ça veut dire aussi que chaque personne en situation de handicap doit, à sa manière, participer à la sensibilisation. Pour ma part, j’ai longtemps caché ma surdité. J’avais peur d’en parler, par crainte de perdre des opportunités. Ne voyant pas de modèles ou d’exemples où l’entrepreneuriat et le handicap étaient bien perçus, j’ai passé une grande partie de ma vie à m’adapter à une société qui n’était pas adaptée à mes besoins réels, en me concentrant davantage sur mon développement professionnel que personnel. J’ai essuyé trop de refus et je voulais surtout acquérir de l’expérience pour prouver ce dont j’étais capable.

Illustration Différent, mais tout aussi capable

Mais j’ai fini par m’épuiser, et ça a tout changé. J’ai accepté ma surdité en me rapprochant de l’univers du handicap. En acceptant d’être plus vulnérable et en échangeant avec des gens qui comprenaient mes réalités, j’ai pu mettre des mots sur ce que je vivais et exprimer mes besoins aux gens d’affaires que je côtoyais. Demander de l’aide est devenu soudainement plus facile. J’ai appris à identifier mes limites et à expliquer comment ma surdité me demande plus d’énergie pour accomplir ce que j’entreprends, contrairement à une personne sans mes défis de communication.

Je suis convaincue que c’est en mentionnant plus souvent les mots « handicap » et « entrepreneuriat » dans les médias, mais aussi dans les discours économiques, que l’on encouragera les acteurs économiques – institutions financières, gouvernements, organismes de soutien – à mettre en place des mesures adaptées, comme un meilleur accès au financement ou des ressources personnalisées. Moi, c’est vraiment ça qui me motive à faire en sorte que l’écosystème entrepreneurial soit plus inclusif.

Pour répondre à un enjeu sociétal

Dire plus souvent les mots handicap et entrepreneuriat permet aussi de mettre en lumière des enjeux importants, comme l’accessibilité et l’équité. Ces discussions sont un point de départ pour des changements concrets qui profiteront à toute la société. L’entrepreneuriat, c’est un moyen puissant de réduire les inégalités et de favoriser l’autonomie des personnes en situation de handicap. C’est en donnant la place à ces voix et en valorisant leurs réalités que l’on peut vraiment faire évoluer les choses.

Parler de handicap et d'entrepreneuriat, c'est créer un écosystème plus inclusif et équitable.

Pour valoriser la diversité dans le milieu des affaires

Enfin, les entrepreneurs en situation de handicap apportent une perspective unique et une grande créativité au milieu des affaires. Ils sont souvent des experts en résolution de problèmes, ayant appris à surmonter des obstacles quotidiens. Mettre en avant leurs contributions permet de valoriser la diversité et d’encourager un milieu entrepreneurial plus inclusif et représentatif de la société.

Lire aussi mon article La débrouillardise, une force pour faire sa place sur Les Affaires.

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